15 Jan L’oeuvre picturale de Pascal Magis
L’oeuvre de Pascal Magis
L’abstrait est un concept qui apparaît à première vue comme péjoratif. En effet, ce dernier est associé à ce qui est vague, éloigné du réel, de l’expérience. Par conséquent, l’abstrait est ce qui ne s’incarne pas et s’inscrit dans une certaine immatérialité, intangibilité.
Pascal Magis semble pourtant donner une toute nouvelle coloration à cette notion. Dès lors, ses œuvres contiennent paradoxalement dans leur matérialité et leur inscription au monde de manière figée une teneur d’expérience.
Que faut-il comprendre dans tout cela ? Il convient bien évidemment de développer cette hypothèse et il faut pour cela prendre en compte un aspect biographique.
Pascal Magis débute sa carrière en tant que tapissier-lissier qui se rattache à la conception et réalisation des ouvrages tissés. On décèle alors un rapport de proximité avec la matière première qu’est le fil, la laine …etc. Son rapport paradoxal à la matière émerge dans l’affrontement entre la fixité d’un tableau qui donne naissance au jaillissement du dedans, fruit de l’expérience présentielle. Ce jaillissement apparaît chez Magis comme une nécessité vitale. Il dit d’ailleurs “ne pas pouvoir peindre à la chaîne”. Le trait est par conséquent intuitif, porté par les vastes ailes d’une volonté ardente de provoquer l’introspection et la correspondance par la force de la couleur. Il réside dans ses peintures une formidable émanation des effluves de cette part primitive blottie dans les entrailles de chacun de nous.
Ce jaillissement du dedans se laisse deviner dans la rapport charnel qui s’instaure avec les toiles de Magis. En effet, elles sont toutes le lieu du relief, symbole de l’intensité, de l’incandescence, de la complexité. La peinture se pose alors comme son écriture instinctive, son substitut aux mots certainement trop généraux.
En effet, la peinture de Magis n’est-elle pas le remède à la carence du concept, à cette tendance proprement humaine à vouloir définir, nommer, classifier, étiqueter ? Ce jaillissement pictural si singulier et dont il est le seul maître nait de cette richesse interne intense et illimitée. Il vient apporter une réponse à une demande non formulée d’un ailleurs encore vierge et inexploré. La circonstance naitra alors de l’harmonie des couleurs singulières créées par ce pur esthète pour faire émerger un beau présentiel qui habite le là.
Pascal Magis parlera d’ailleurs lui-même de “curiosité” et cherchera à “raconter une histoire qu’on ne connait pas”. Cette histoire inconnue peut être interprétée selon le point de vue de la temporalité. En effet, l’artiste s’attache à l’esquisse, procédé le plus à même de traduire ce flux de conscience incessant et complexe. Il réussit donc le tour de force d’inscrire dans son format favori de cent centimètres par cent la réification d’un présent qui se veut inconnu, mouvant et re-venant.
La notion de revenance semble pouvoir donner un éclairage au but poursuivi par Pascal Magis. La revenance implique un retour et l’existence d’un avant, d’un passé. Dès lors, il ne peut y avoir revenance que si une première et originelle naissance a déjà eue lieu. Cette naissance, Magis l’opère à chaque oeuvre. Elle devient alors un retour vers un inconnu en même temps qu’elle est un retour à l’origine. C’est dans la reconquête de son propre espace inconnu et dans la transformation que chaque oeuvre devient une revenance.
C’est alors par la force immense et infinie de l’oeuvre que l’artiste vient échapper au temps en ce qu’elle porte l’ouverture à la fois mortelle et régénératrice opérée par le travail de mémoire. Dès lors, faire détenir à l’oeuvre de Pascal Magis la clé de la revenance qui survit à l’existence et la finitude humaine ne revient-il pas à inscrire ce dernier dans un infini voyage dans le temps ?
Retrouvez la galerie de Pascal Magis sur le site officiel.
Cet article est issu de la rencontre et des discussions avec Céline Magis, la nièce de Pascal Magis. Je tiens à la remercier pour le temps qu’elle m’a accordé et pour m’avoir permis d’écrire cet article.
Mia
Posted at 20:13h, 14 juinTu ne vas certainement pas me croire, mais je trouve que l’art l’abstrait est plus profond que les dessins, portraits ou autres. Je ne connaissais pas Pascal Magis avant ton article, mais je suis déjà fan ! Merci pour ce partage !
Chronique Bordelaise
Posted at 20:28h, 01 aoûtSon oeuvre mérite grandement d’être connue.
Il avait un grand talent.
Belle soirée 🙂